samedi 21 février 2015

Le dernier vers pour la route

 

Vendredi 20 février 2015, 22 h 30, au bar de la Comédie à Montreuil, c'est la douche froide : un SMS qui tombe sur le portable d'une amazone de passage : " Hafed est mort ce soir après la tentative d'une nouvelle opération, le coeur n'a pas tenu." Inquiétante étrangeté, au même instant, la chanteuse lilloise de Douche froide assène son punk, tendance coldwave-oï. Dehors, il pleut. Dedans, une coulée de sueur glacée se transmet de colonne vertébrale en colonne vertébrale, au fur et à mesure que l'information circule. Après la sueur, les larmes, après les larmes, l'alcool, pour refluidifier ce sang qui ne coule plus. 
–  À la mémoire d'Hafed !
Pintes tendues vers le plafond, on s'en jette une, puis deux, sans prendre le risque qu'une goutte de condensation ne tombe dans le breuvage –  cul sec – c'est pas le moment de mettre de l'eau dans notre vin, Hafed serait furax.
Putain de merde ! Un de plus, et pas des moindres : très impolyvalent, il maniait avec art la plume & la plume, et un humour explosif, à fendre les coffre-forts. Un reubeu bouffeur de ralouf, qui picolait, et qui n'aurait concédé à personne, et encore moins à un être se voulant plus suprême que lui, une once de sa liberté.
Il est mort d'avoir eu la mauvaise idée de faire sa première attaque (cardiaque, pas de banque) en taule. Il en est ressorti le coeur en vrac. Pourtant, du coeur, il en avait. Quand il a épousé Francine, il était encore sous les verrous. Il y eut quand même une fête, et pour l'occasion, sa princesse d'ébène portait une robe sexy en satin bleu turquoise, incarnation de la force de l'amour qui s'affranchit des murs. Hafed avait préparé pour elle un texte qui fut lu à sa place. Il finissait comme ça : " Francine, acceptes-tu de me prendre pour époux, pour le meilleur et pour le pire, jusqu'à ce que TA mort nous sépare ? " 
Éclat de rire général... 
Lilith saura se souvenir de toutes celles et ceux qui lui offrent à réfléchir, et qui savent la faire rire. Hafed est de ceux là...

*** 
À retrouver : la belle - dernière - interview d'Hafed dans le dernier numéro (n°9) de la revue Chéri-bibi...
                                                      

1 commentaire:

  1. Merci, Lilith !

    Plein de pensées à tous ses millions de sourires et d'espiègleries, et à son intransigeance magistrale…

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